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Le coeur est à la fête, c’est le mois de l’ESS !

Confiance ou bras de fer ? La conférence de lancement du Mois de l’économie sociale et solidaire (ESS) se jouait sur les deux tableaux hier, au siège du groupe mutualiste VYV, où Marie-Agnès Poussier-Winsback avait fait le déplacement. Nouvelle ministre de l’Économie sociale et solidaire, de la Participation et du Partage de la valeur dans le gouvernement de Michel Barnier, elle a écouté attentivement, souriante face aux propos sans détours de Stéphane Junique, président du Groupe VYV qui accueillait l’événement, puis de Benoît Hamon, président d’ESS France qui porte la voix des différentes familles de l’économie sociale et solidaire. 

Stéphane Junique : « Notre pays n’a jamais eu autant besoin de l’ESS »

C’est avec des mots empreints de détermination que Stéphane Junique a ouvert la conférence, insistant sur la résilience de l’ESS et sur sa vocation à redonner confiance en l’avenir : « Être un acteur de l’ESS, c’est d’abord ne pas se décourager. Nous sommes des acteurs de l’optimisme en action », a-t-il affirmé, faisant écho au lourd contexte politique, social et budgétaire actuel. Citant Claude Alphandéry, pionnier de l’ESS en France, Stéphane Junique a aussi appelé les acteurs du secteur à se positionner en « bâtisseurs de lendemains désirables », capables de renouveler les liens sociaux et de porter un message de solidarité.

Dans un discours de haute tenue, il a mis en avant la lutte contre le fatalisme, affirmant que l’ESS est à la fois « une économie des solutions et un projet de société », qu’il convient particulièrement de soutenir en cette période marquée par l’accroissement de la pauvreté et le déclassement social. Pour Stéphane Junique, le Mois de l’ESS ne doit pas être une simple célébration festive, mais bien l’occasion de prendre des initiatives pour « réinventer des idées et des mécanismes de progrès ». Il a également souligné la responsabilité des organisations et des entreprises de l’ESS, qui doivent continuer « à porter des idées pour créer un avenir radieux avec l’idée que les générations futures vivront mieux que nous, une idée qui tend à s’effacer ».

Benoît Hamon : « L’ESS est un acteur majeur de la démocratie »

Benoît Hamon, président d’ESS France, a surtout mis en exergue le rôle fondamental de l’ESS dans la démocratie française. Les modèles économiques de l’ESS placent en effet toujours la démocratie au cœur de leur fonctionnement, rappelle-t-il. Une tradition qui remonte au XVIIIe siècle et qui confère aux entreprises de l’ESS et aux associations une légitimité très particulière : « Face au blocage institutionnel actuel, nous pensons qu’il ne suffit pas de réformer les institutions, mais qu’il faut étendre le champ de la démocratie », a-t-il affirmé, soulignant que la voix de l’ESS doit être d’autant mieux écoutée qu’elle répare sans cesse les dégâts causés par l’économie classique ou par l’État lui-même, en matière de pauvreté, de précarité ou de santé par exemple.

Benoît Hamon a également abordé la question très sensible du budget de l’ESS. En plein débat parlementaire autour du projet de budget 2025 présenté par le gouvernement, il a vertement critiqué la réduction des financements dédiés, directement ou indirectement, à l’économie sociale et solidaire. Il a rappelé que cette perspective menace des milliers d’emplois dans les structures de l’ESS, mais aussi des milliers d’actions qui permettent de maintenir le tissu social en France. « Nous sommes les acteurs du premier kilomètre de l’intérêt général », a-t-il insisté.

Avec passion, Benoît Hamon a aussi déploré que le Rassemblement National, non content de voir le budget de l’ESS à Bercy réduit de 25%, ait tenté de supprimer intégralement les crédits dédiés aux têtes de réseau de l’ESS, au motif qu’elles n’apporteraient aucune « valeur ajoutée économique ». « Nous ne demandons pas des miettes », a affirmé Benoît Hamon en s’adressant à la ministre, mais simplement « les ressources qui permettent aux CRESS (Chambres régionales de l’économie sociale et solidaire) de remplir leurs missions définies par la Loi ».

Marie-Agnès Poussier-Winsback, une ministre encore timorée

En réponse, la ministre de l’Économie sociale et solidaire, Marie-Agnès Poussier-Winsback, a d’abord tenu à rassurer les acteurs présents quant à la priorité que le gouvernement entend donner à l’ESS. Soulignant que la création de son ministère était un signal fort de la part de Michel Barnier, adepte d’un « gaullisme social », elle a remercié les organisations de l’ESS pour leur « travail colossal » et a laissé entendre qu’elle défendrait leur cause.

Reconnaissant que les inquiétudes budgétaires sont fondées, la ministre a dit sa « confiance dans le gouvernement » pour obtenir des financements plus conséquents pour les têtes de réseau de l’ESS : « Je crois pouvoir dire que nous aurons plus, parce qu’il faut plus ». Cette confiance ayant l’air encore évanescente, elle a précisé : « Ce budget n’a pas été préparé par nous, mais nous ferons en sorte d’obtenir les ressources nécessaires ». Un voeu assurément sincère, assorti de trois « intuitions » de la ministre pour l’avenir de l’ESS : sa dimension territoriale, son potentiel de croissance, et sa reconnaissance internationale… Une détermination encore bien timorée.

Concluant son propos, la ministre a dévoilé deux axes de sa stratégie pour l’ESS : sa volonté, d’une part, de voir lancée par ESS France une campagne nationale de sensibilisation, pour mieux faire connaître l’ESS aux Français qui bénéficient souvent de ses services sans le savoir. Et son étonnement, d’autre part, de voir que l’ESS représentait 14% de l’emploi privé en 2014… et que ce taux n’a pas bougé dix ans plus tard. Mais qu’ont donc fait les acteurs de l’ESS depuis 10 ans ?

Un Mois de l’ESS en fête… avec Mediatico

Vexant constat d’échec, ou découverte naïve du potentiel de l’ESS ? À l’heure où l’Etat déshabille les secteurs de l’engagement et de la solidarité et menace le secteur de 186.000 destructions d’emplois, nous choisirons une nouvelle fois de regarder le verre à moitié plein, pour faire honneur au Mois de l’ESS. Un mois « qui ne doit pas être le mois du gris, de la déprime », a dit la ministre. Un mois où nous ne pouvons pas nous décourager, car « nous sommes des acteurs de l’optimisme en action », selon Stéphane Junique. Un mois qui dessine des alternatives pour une société plus juste et solidaire. 

Alors célébrons l’économie sociale et solidaire, que diable ! 
Et commençons par célébrer les 10 ans de Mediatico (eh oui !). Nous vous attendons ce jeudi à 18h30, les inscriptions sont ouvertes !

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