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{IMPACT 13 – Interview} Tous jardiniers réinvente les jardins partagés

Consommer mieux et à moindre coûts, s’initier à la permaculture, c’est la solution que Jérôme Fourmont propose avec la mise en place de Tous Jardiniers. Sa volonté : proposer des ateliers ouverts à tous pour (ré)apprendre à cultiver soi-même les fruits et légumes de saison, sans pesticide et de façon responsable.

Salut Jérôme ! Parle-nous un peu de toi. 
Qu’est ce que tu faisais avant de te lancer dans l’aventure Tous Jardiniers ? 

Ok allons-y ! J’ai 51 ans et un parcours plutôt classique. Après avoir fait une grande école, j’ai commencé comme auditeur et consultant dans un grand cabinet puis j’ai intégré des groupes internationaux. Comme j’avais une double spécialisation en informatique, j’ai fait une carrière dans ce secteur, au sein d’entreprises connues comme Quiksilver, Dior, ou encore Clarins. J’ai passé 18 ans de ma vie à être salarié et cadre dirigeant. Puis un jour, j’ai pris un grand coup de pied aux fesses, en étant licencié. Cet événement a créé une crise de confiance, en moi, vis-à-vis du management en général et de l’autorité d’entreprise. Mais finalement, cette épreuve m’a donné la force de me lancer. En 2011, j’ai donc décidé de sauter le pas et de me mettre à mon compte, pour accompagner les entreprises dans leur transformation numérique. L’aventure entrepreneuriale commençait. Ce n’est que très récemment que je suis passé à l’entrepreneuriat social.

Justement, qu’est-ce qui t’a amené à l’entrepreneuriat social ?

C’est l’approche de la cinquantaine qui a probablement accéléré ma recherche de sens et m’a permis d’envisager le projet Tous Jardiniersil y a moins d’un an. C’est donc un projet tout frais ! J’avais envie de partager mon expérience et contribuer à un meilleur avenir social et environnemental.  C’est en famille qu’a émergée l’idée. Ma femme, en premier lieu, est particulièrement sensible aux questions du mieux-manger. Elle a toujours accordé de l’importance au fait de consommer bio autant que possible, surtout les fruits et légumes. Et puis il y a 5 ans, ma fille qui a aujourd’hui une vingtaine d’années, cherchait un stage. C’est vraiment là que nous est venue l’idée de Tous Jardiniers. Et si on créait ensemble une petite entreprise familiale ? On avait tous envie de mettre les mains dans la terre, de cultiver nos propres fruits et légumes. De revenir à l’essentiel. Alors on a travaillé le concept, créé le site web et c’était parti !

Tous jardiniers c’est quoi  ? Quel est le concept ?

Nous mettons à disposition des citoyens des jardins partagés moyennant un abonnement annuel. Pour 1 euro par jour, soit à peine le prix d’un café ! Ça vous donne accès à votre parcelle de 20 à 50m2 et à tous nos ateliers pédagogiques. Ces parcelles vous permettent de cultiver vous-mêmes vos fruits et légumes, sans pesticides et de façon responsable.

Ok, capiche. C’est quoi la différence avec les parcelles communales partagées ? Quelle est votre valeur ajoutée ?

On a bien essayé au début d’aller démarcher les mairies mais malheureusement elles ne peuvent pas nous mettre de terrains à disposition. C’est donc du côté du privé qu’on s’est tourné, vers des propriétaires fonciers. Ce sont des agriculteurs, des entreprises, des copropriétés, des promoteurs immobiliers. A la différence d’une parcelle communale classique, notre valeur ajoutée se situe dans nos ateliers pédagogiques. Ils ont lieu chaque semaine au sein même des jardins, afin de guider l’ensemble de notre communauté vers une culture saine, efficace et économique. Concrètement, on leur donne les clés de la réussite, reposant sur les principes de la permaculture. Comme par exemple des apprentissages sur le cycle lunaire, ce qu’il faut planter selon la saison et l’entretien, comment récolter ses fruits et légumes, ou encore comment lutter contre les petits nuisibles sans utiliser de pesticides. 

On adore ! A quoi ressemblent tes clients ? 

Initialement, j’avais pensé que ce serait plutôt des jeunes retraités qui ont du temps. Mais j’ai été surpris de constater que ce sont plutôt des familles. 95% de mes clients sont actifs. Il s’agit par ailleurs essentiellement de femmes. Dans le cas d’une mère de famille, elle est toujours l’initiatrice mais elle va inciter son conjoint et ses enfants à participer aux ateliers chez nous, elle va les sensibiliser au mieux-manger. 

A quels enjeux et besoin vous répondez ?

Au-delà de la satisfaction procurée, c’est pour la famille une alternative aux courses et un allègement au niveau du porte monnaie. C’est également un gage de qualité. Le bio devient accessible au prix de de la grande distribution, sauf que les fruits et légumes ne seront pas bourrés de pesticides. Autre avantage : ciao l’empreinte carbone liée au parcours kilométrique des produits. Vous avez un impact environnemental très fort quand vous cultivez près de chez vous ! 

Quel plaisir de reprendre le pouvoir… Qu’est ce que ça apporte au niveau perso de cultiver soi-même ses fruits et légumes ?

Au travers de cette activité et ce retour à la terre, on prend soin de soi et de sa famille en renouant avec la nature. On se fait plaisir, on redécouvre des saveurs, des goûts oubliés. On se  détend aussi, on se reconnecte avec le vivant. On partage des savoirs, on rencontre de nouvelles personnes. On cultive donc aussi le lien social, de proximité. Ce type d’initiative fait souvent écho à une quête de sens et un besoin de renouer avec l’essentiel. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous sommes partenaires lors de nos ateliers pédagogiques avec des naturopathes, des sophrologues, des professeurs de yoga. Ca participe à cette recherche d’ancrage dans le moment présent, à la curiosité et la recherche d’un équilibre de vie.

Que de positivité, ça fait du bien ! Comment ça fonctionne si je suis intéressé(e) ?

C’est le principe d’un abonnement, tout simple, pour 1 euro par jour pendant 1 an. Vous avez ainsi accès à votre terrain et à tous les ateliers. Le site internet permet de découvrir notre offre et un système de chat est tout de suite disponible pour entrer en contact. L’idée, c’est d’échanger directement avec vous pour mieux vous connaître et cerner vos besoins. Je vais par exemple vous poser des questions sur votre expérience en matière de jardinage, ou encore me renseigner sur le nombre de bouches à nourrir. Ensuite, on affine sur vos envies. On va essayer d’identifier ensemble l’ambition que vous pourriez avoir pour ce premier jardin. Grâce aux animatrices, vous allez ensuite commencer à planter les différents produits que vous souhaitez voir dans votre assiette !

Justement, on est en janvier actuellement. Quels types de légumes peut-on manger en hiver ?

Contrairement aux idées reçues, ils sont nombreux et variés et raviront vos soupes et autres créations culinaires. J’ai par exemple en tête tous les choux (fleur, frisés, de Bruxelle) mais aussi le rutabaga, la mâche, le panais, les courges, le salsifis, les topinambours, les endives, les betterave, les carottes, les épinards, les poireaux, les radis d’automne et d’hiver… Des légumes plutôt caloriques et gourmands, tels que la patate douce et le potimarron, qui égayent les plats hivernaux et permettent de faire le plein de vitamines !

Les légumes en deviendraient presque gourmands ! Vous avez des perspectives d’expansion à ce stade ?

Globalement pour l’instant, nous proposons 2 jardins de 5 hectares au total, autour d’Aix en Provence. Nous espérons pouvoir nous étendre de plus en plus, afin de donner accès à nos jardins partagés au plus de citoyens possible. Nous envisageons aussi de nous tourner vers les entreprises ou encore les écoles. Cette expansion pourrait se faire sur le bassin méditerranéen dans un premier temps et pourquoi pas sur tout le territoire par la suite ! 

Quels sont les plus grands défis que tu as eu à relever en tant qu’entrepreneur ? Est ce que tu aurais des conseils à partager à ceux qui voudraient se lancer ?

Je dirais que la première qualité à avoir, c’est la persévérance. C’est essentiel, car il faut retourner au “combat” tous les jours. Il faut toujours aller chercher, convaincre, que ce soit les clients ou les banques. Il faut également savoir faire preuve de flexibilité. Par exemple, les clients ne sont pas toujours ceux qu’on imaginait au départ. La stratégie est donc à revoir dans ces cas-là, à adapter selon notre cible. La remise en question permanente a été quelque chose de difficile pour moi. Le plus important, je dirais que c’est de ne pas tomber amoureux de son idée. Il faut accepter qu’elle soit challengée en permanence par d’autres. Il faut être capable de pivoter très souvent. Il faut expérimenter vite, et s’adapter en fonction des résultats. Mon dernier conseil, ce serait de toujours assurer ses arrières si on veut se lancer. Soit un conjoint qui assure à la maison, soit avoir très peu de besoins pour vivre. Le chemin est assez long et éprouvant, il faut en avoir conscience. La liberté de l’entrepreneur peut faire rêver mais le patron a changé de forme, c’est le client désormais. Il y une grande tranquillité et sécurité dans le statut de salarié. Personnellement je ne regrette rien, mais il faut bien avoir tout ça en tête !

Chez impact 13, on fait un tour de France des innovations à impact positif mais on a tous nos régions préférées. Quelle est la tienne et pourquoi ? 🙂

Le Pays Basque, que j’ai découvert pendant 3 ans quand j’étais directeur informatique chez Quiksilver à Saint Jean de Luz. J’ai adoré ses montagnes, l’océan… Des sites naturels totalement dépaysants aux vieilles traditions qui se perpétuent, en passant par les spécialités culinaires… C’est une région qui a beaucoup à offrir !

Vidéo réalisée par Antinéa Esteban et Simon Gadrey / Article proposé par Caroline Stalder 

L’interview de Tous Jardiniers est proposée en partenariat avec l’incubateur INCOPLEX Green Sud, structure d’accompagnement des entreprises à impact en région sud.  

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