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Bruno Le Maire court-circuite le capitalisme… et il n’est pas le seul !

Disruptif ! Ce devrait être le mot-clé de la rentrée, tant chacun se montre aujourd’hui disruptif. L’écologiste Cécile Duflot, qui veut apprivoiser la finance. Le mathématicien Cédric Villani, qui se voit en futur maire ecolo-scientifique de Paris. Ou l’économiste Thomas Piketti, qui appelle à « dépasser le capitalisme », dans son ouvrage « Capital et idéologie » : il y propose que les salariés détiennent 50% des sièges dans les conseils d’administration. Ou que les accords commerciaux internationaux soient assortis d’objectifs écologiques contraignants. Évident pour certains. Décoiffant pour les tenants de l’ordre établi.

Lui aussi, décoiffe. Jacques Richard, éminent professeur d’économie à Paris-Dauphine, sera jugé le 30 septembre prochain sous trois chefs d’inculpation : subversion de l’ordre économique mondial, manipulation de la comptabilité, marchandisation de la nature. Rassurez-vous, un procès-spectacle en vérité, dont Mediatico est partenaire, qui éclaire une révolution en puissance. Car Jacques Richard veut transformer le système comptable des entreprises du monde entier, en donnant au capital humain et au capital naturel une place aussi importante que le capital financier. Le calcul de la valeur des entreprises en serait radicalement transformé. Vous avez dit disruptif ?

Mais le pompon est venu de tout en haut. Avec cette petite phrase : « Le capitalisme du XXe siècle n’est plus viable ». Vous en êtes convaincu, compte tenu de sa capacité destructrice ? D’accord. Mais lui… tout de même. Cette déclaration est venue de Bruno Le Maire, lui-même, ministre de l’Économie et des Finances ! Fils d’un cadre de Total, défenseur de la privatisation des autoroutes en 2006, de celle d’Aéroports de Paris en 2019, Bruno Le Maire court-circuite le capitalisme et enfonce encore le clou cette semaine : il appelle les entreprises dont l’État est actionnaire à se doter d’une « raison d’être » dès 2020. Dans le droit fil de la Loi Pacte qu’il a portée l’an dernier. Et si Bruno Le Maire faisait sa mue ?

Ou plutôt, et si le capitalisme tout entier faisait sa mue ? Ce matin-même, 15 investisseurs institutionnels répondent à l’appel de Christophe Itier, Haut-commissaire à l’économie sociale et solidaire, pour développer l’investissement à impact social dans l’Hexagone : Amundi, premier gestionnaire d’actifs européen, mais aussi BNP Paribas, Groupama, Grameen Crédit Agricole, la Fondation de France, la Caisse des Dépôts… ont rejoint Le French Impact, la bannière française pour l’innovation sociale lancée en janvier 2018.

Ainsi, tout vacille. Le sûr n’est pas certain. La finance est un outil. L’économie n’est pas une science exacte. La comptabilité est un outil politique. Signe des temps. Signe d’une transition nécessaire. Urgente. Indiscutable. Puisqu’elle est déjà engagée.

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